Depuis près de 30 ans, Les Places d’Or s’est imposé comme le salon de référence dans l’univers du design et du packaging de luxe. Ce rendez-vous incontournable de donne l’occasion aux fabricants et designers de présenter leur plus belle création et réalisation de l’année, faisant des Places d’Or un révélateur de tendances du marché du packaging de luxe..

Vincent DELAVENNE : Vice-président Packaging Coty Luxury

Vincent Delavenne, Vice-président packaging Coty Luxury, riche d’une expérience de 25 ans dans le packaging, principalement de luxe, livre les facettes de son métier. Shiseido, Bvlgari, Oriflame, Dior, Unilever puis Coty en catégories parfums, maquillage ou encore skincare, autant de missions exercées en France, en Suisse, en Belgique et en Chine qui lui confèrent un savoir précieux dans l’art de packager. Rencontre.

Pourquoi avoir intégré l’École Supérieure d’Ingénieurs en Emballage et Conditionnement ? Aviez-vous des affinités avec le domaine du packaging ?

Je cherchais une école d’ingénieurs et des professeurs de l’Université de Reims m’en ont parlé en termes motivants. Depuis le premier jour jusqu’à aujourd’hui, je n’ai jamais regretté mon choix. Le fait d’étudier des produits du quotidien, de formaliser les contraintes ont contribué à ma passion pour cette industrie.

Ingénieur qualité à l’issue de vos études, vous devenez rapidement Packaging manager chez Shiseido. Qu’avez-vous apprécié lors de cette première approche du luxe ?

J’y ai trouvé mon domaine de prédilection. J’ai eu la chance d’être embauché par un très grand professionnel du packaging. Grâce à lui et mes anciens collègues, j’ai tout appris de ce métier : les techniques, les différents services avec qui travailler, la gestion de projets, la résistance au stress et le goût de l’innovation notamment pour Jean-Paul GAULTIER Le mâle.

Cinq ans en Chine pour Dior puis Unilever, qu’avez-vous appris là-bas en termes de méthodes ?

Tout était nouveau pour moi, le continent, la culture, l’approche psychologique autant que les rapports humains pour moi comme pour mes collègues chinois. Tant de différences mais une règle primordiale : ç’est à vous de vous adapter.  Dans les rapports professionnels très hiérarchisés, il faut vite comprendre quand un oui… veut dire non ! L’autre grande différence culturelle réside dans la possibilité de donner son avis sur l’aspect esthétique des choses. Par contre, quand une décision est prise, elle génère une grande motivation et une gigantesque énergie. Le fait d’y avoir vécu m’aura permis de comprendre toute la diversité des cultures du monde.

Retour à Paris, vous intégrez Coty dont vous êtes le VP Packaging Luxury Division. 

Chez Coty, dont le chiffre d’affaires beauté est de 9 milliards €, je suis en charge, avec mon équipe, du développement packaging des marques de beauté Boss, Calvin Klein, Gucci, Tiffany, Burberry, Marc Jacobs, Lancaster, Philosophy, Mexx, Bruno Banani, et bien d’autres. Cela implique la prise en compte des aspects techniques du développement packaging, du brief, de l’établissement des coûts, la gestion de projets, de la qualité, de la recherche de nouveautés, de tous les aspects du développement durable, et de l’industrialisation des produits. Nous gérons également tous les contacts avec les fournisseurs, et les différents donneurs d’ordre, dont le choix se fait d’après un subtil mélange de contraintes techniques, stratégie achats et disponibilités des uns et des autres.

Pouvez-vous concevoir un projet de packaging de marque basé uniquement sur la découverte d’une innovation fournisseur ?

C’est le propre de notre métier. L’innovation d’un fournisseur n’existe que si elle peut être utilisée par une marque et une marque n’existe que parce qu’elle se …démarque ! Tout l’art du packager est de reconnaitre une innovation, de la sélectionner en fonction de l’esprit de la ou des marques qu’il représente et de la mener à bien. Un flacon de parfum avec 10 % de verre recyclé ménagé (PCR), comme pour CK EVERYONE, est une des dernières réalisations de mon équipe. On a ici une vraie cohérence entre un engagement écoresponsable d’un fournisseur de verre assurant une réduction des émissions de CO2 et le message d’une marque. Ceci est une grande innovation dans la mesure où nous avons été les premiers à l’exploiter pour de grandes quantités et à décrocher de surcroit la certification « cradle to cradle » dont nous sommes ravis !

Quel est le plus grand changement auquel vous ayez été confronté ?

 L’aspect sustainabilité est une révolution qui a commencé lentement depuis très longtemps mais qui est loin d’être finie. Elle s’accélère au rythme des crises fréquentes que nous connaissons : climat, océans, mondialisation, COVID… Beaucoup de codes du luxe sont en train de changer et l’emballage sera toujours le messager de ces codes. Aux packagers de se les appropriés pour les appliquer à leurs produits. 

Une anecdote professionnelle ?

Entre autres, je me souviens la première fois que, jeune ingénieur, j’ai signé mon premier plan d’outillage plastique qui engageait ma responsabilité technique et l’investissement conséquent qu’il y avait derrière ! J’ai passé quelques nuits à revérifier toutes les cotes d’assemblage ! C’était pour un coffret de miniatures Jean-Paul Gaultier 

Ingénieur de formation, amateur d’arts, cette combinaison est-elle primordiale pour intégrer l’exigence esthétique à celle de la technique dans votre métier ?

Toutes les expériences peuvent servir une carrière qu’elles soient sportives, culinaires, artisanales…. Mais il faut surtout s’impliquer dans le secteur choisi pour le comprendre et anticiper les futurs besoins. Il faut 1an et demi en moyenne pour sortir un parfum au nouveau design. Il faut donc imaginer ce qui va « être à la mode » dans 1 an et demi puis restera à la mode pour 10 ans, voire plus. Il faut être de son époque et anticiper la suivante. 

Le plus beau packaging historique que vous ayez-vu ?

Dans notre métier, le plus compliqué à conditionner sont les produits liquides. Je suis donc toujours impressionné par deux types d’emballage très anciens et vous allez sourire :  l’amphore méditerranéenne et son bouchon remplacée par le tonneau gaulois. Mais plus près de notre époque, rien ne remplacera la transparence, la brillance et la beauté du verre, jusque dans sa fragilité.

Comment verriez-vous évoluer votre métier ?

Notre métier doit proposer des solutions nouvelles en ce qui concerne la sustainabilité, et il y en a pour 20 ans au moins. Il faut tout réinventer, et vite, très vite !

Un rêve à réaliser ?

Transmettre.